Le travail de Fernande Petitdemange, Au-delà des mers, est un lent cheminement dans l’univers de l’empreinte (parfois à peine perceptible), de la trace, de la décomposition, du fragment… Composant pas à pas son cabinet de curiosités, la photographe collecte, principalement en bord de mer, des objets qui échappent à notre regard devenu moins curieux à force de se contenter de ce monde trop évident qui nous est « offert » quotidiennement. Mais cette quête n’est pas de l’ordre de la classification, de la collection, qui nomme comme pour mieux écarter la singularité. Ici, ce qui est donné à voir est d’une autre dimension. La tête de turbot, qui d’ordinaire achève tristement sa vie dans le circuit de traitement de nos déchets, retrouve ici son mystère en nous ramenant loin dans ce temps que nous maîtrisons de moins en moins. Cette tête sans âge, les plumes, les algues, les bouts de cordage… sont autant d’invitations à un réenchantement de nos regards. Fernande Petitdemange ne cherche pas à imposer sa vision. À travers tous ces fragments qu’elle « emprunte » à l’oubli, elle révèle de manière sensible toute la fragilité de ce monde auquel nous appartenons.