Il y a quelques années nous avions déjà réalisé avec Maxence Rifflet un sténopé géant avec 4 objectifs — un quadricerasténope — qui permettait littéralement d’entrer dans un appareil photographique. À l’intérieur, les différentes focales et orientations des objectifs offraient une perception diffractée de la réalité qui invitait à s’interroger sur les phénomènes optiques.
Le quadricérasténope avait été l’occasion de multiples expérimentations avec le public pendant l’été. Face à l’intérêt pédagogique de l’objet et à l’engouement du public, il a ensuite été installé dans plusieurs établissements scolaires des Côtes-d’Armor pendant deux années.
Nous proposons cet été de créer un dispositif similaire, inspiré du roman « L’homme boite » du japonais Kōbō Abe sorti en 1973, en resonnance avec l’exposition de Issei Suda présenté au Centre d’art GwinZegal.
Cette dissociation du couple voir/être vu, est au centre des dispositifs de surveillance à l’oeuvre dans l’architecture carcérale, dont la prison de Guingamp dans laquelle nous travaillerons, est un exemple. Mais ce point de départ littéraire renverse cette thématique, puisque l’homme-boîte s’enferme volontairement et qu’il déambule néanmoins librement dans l’espace public. À ce point de départ littéraire, nous associons un ensemble de documents visuels, issus des travaux antérieurs de Maxence Rifflet comme de l’histoire de la photographie, qui permettent de se faire une idée de l’orientation de la recherche. Nous pensons en particulier au Portrait multiple de Marcel Duchamp inspiré des expériences de « photographie récréative » très en vogue au début du XXe siècle. Un homme fait face à deux miroirs, deux autres miroirs sont disposés derrière lui, de part et d’autre de l’appareil photographique.
La machine optique explorera cette fois la dissociation du couple voir /être vu ainsi que la démultiplication de la figure. Le miroir sera cette fois notre principal matériau de travail.
Le projet se partage entre un temps de résidence d’une semaine et des temps d’expérimentations avec des publics divers. Centre de loisirs, centre hospitalier, habitants seront invités en compagnie de Maxence Rifflet et des médiatrices du centre d’art à tester cette « machine à voir ». Prendre le temps de regarder, d’être surpris et de comprendre les effets optiques, cinétiques et poétiques propres à la photographie sera un des enjeux de cette proposition.