La révolution iranienne de 1979 constitue un moment pivot dans la construction de l’identité politique et culturelle des iraniens. Cette conjoncture historique de la crise face à la modernité iranienne a créé deux temps bien distincts dans le langage quotidien de ce peuple : celui d’avant et celui d’après. C’est par cette distinction temporelle que les iraniens expriment leurs sentiments d’appartenance ou de non appartenance au système de pensée politique produit par le régime postrévolutionnaire. Iranienne, vivant en France depuis 2007, et me situant au croisement de trois langues, j’ai constamment été confrontée à la question de la définition de mes origines. Cette question exempte de réponse évidente a formé tout d’abord, inconsciemment, puis consciemment les sujets que j’ai choisis de traiter en tant qu’artiste. La représentation de l’espace urbain trouve une place importante dans ma pratique photographique. Ces espaces réels ou imaginaires offrent une structure où une conjonction d’éléments variés (image, textes, objets, sons, etc.) autour des sujets liés à mon pays natal devient possible. En traversant les quartiers de la ville de Téhéran (Haut Bas Fragile, 2016), on fréquente les librairies et les maisons d’éditions de la rue Enghelab (Rue Enghelab : la révolution par les livres, Iran 1979–1983, 2019) et on arrive enfin à Persian Square pour écouter la musique pop de Tehrangeles (Soleil of Persian Square, 2021).
Critique d’art et commissaire d’exposition, Magali Nachtergael est professeure en études françaises à l’université Bordeaux Montaigne. Spécialiste de culture visuelle, photographie et art contemporain, elle a été lauréate avec Anne Reverseau de la bourse curatoriale des Rencontres d’Arles pour l’exposition “Cartes postales, nouvelles d’un monde rêvé” (en 2019). En 2015 et 2016, avec Claire Jacquet et Pascal Beausse, elle a monté des expositions à Bordeaux, Orthez et Séoul autour de Roland Barthes et les collections du Frac Aquitaine et du CNAP. Outre de nombreux articles sur la représentation de soi et les liens entre littérature et arts, elle a publié Les Mythologies individuelles, récit de soi et photographie (Rodopi, 2012), Roland Barthes contemporain (Max Milo, 2015) et Poet Against the machine, une histoire technopolitique de la littérature (Le Mot et le reste, 2020) et un collectif avec Charlotte Foucher Zarmanian, Le phototexte engagé, une culture visuelle du militantisme paru aux Presses du réel en 2021. Elle prépare un livre sur les renarrations, l’archive et l’écriture de l’histoire dans l’art aujourd’hui.
Pascal Beausse est responsable des collections photographiques du Centre National des Arts Plastiques. Critique d’art, il est l’auteur d’essais et entretiens portant sur les travaux de nombreux·euses artistes et photographes, notamment Maria Thereza Alves, Jimmie Durham, Cécile Hartmann, Candida Höfer, Florence Lazar, Teresa Margolles, Allan Sekula, Bruno Serralongue, Jean-Luc Vilmouth et Wang Du. Commissaire d’exposition, il a notamment présenté : “The Family of the Invisibles” (Seoul Museum of Art, Seoul, 2016), “Y he aquí la luz” (Museo de Arte Miguel Urrutia, Bogotá, 2017), “Vivre avec les bêtes” (Gwinzegal, Guingamp, 2018), “Hiroshima Art Document” (Hiroshima, 2019), “Martine Aballéa — le jardin d’Auguste Comte” (Maison Auguste Comte, Paris, 2020). En 2022, il présentera les expositions : Commande Photographique Nationale “Regards du Grand Paris”, aux Magasins Généraux à Pantin ; “Image 3.0”, commissariat avec Quentin Bajac au Cellier, à Reims ; “Onomichi”, exposition personnelle de Francis Morandini au Bleu du Ciel, à Lyon.
Photographe iranienne née en 1981 à Téhéran, Hannah Darabi a étudié à la Faculté des Beaux-Arts de Téhéran, puis à l’Université Paris VIII-Saint-Denis. Aujourd’hui installée à Paris, son pays d’origine reste le sujet principal de la plupart de ses séries photographiques. Afin de révéler la situation politique complexe de ce pays, elle crée des séries dans lesquelles ses photographies interagissent avec d’autres matériaux, tels que des textes, des images d’archives ou des objets.
Le livre de l’artiste occupe une place privilégiée parmi les autres formes de représentation qu’elle explore. Ses livres font partie de collections publiques et privées, et son travail Rue Enghelab, la révolution par les livres, Iran 1979–1983, publié en 2019 par Spector Books et Le Bal, a reçu de nombreux prix. Soleil of Persian Square, son récent projet de recherche-création en lien avec la diaspora Iranienne de Californie de Sud et sa musique populaire, a été publié par le Centre d’Art Gwinzegal en 2021.
L’ouvrage Soleil of Persian Square est réalisé avec le soutien à l’édition du CNAP, Centre national des arts plastiques.