Geoffrey Cottenceau et Romain Rousset se sont rencontrés en 1997 à l’École cantonale d’art de Lausanne (ECAL). Les deux artistes partagent le goût du détournement, du bricolage, et posent sur notre monde contemporain un regard décalé, « pince-sans-rire », avec une certaine insolence bienveillante. Ils produisent le plus sérieusement du monde des images, résultats de séances que l’on ne peut qu’imaginer récréatives et ludiques. Ils transfigurent allègrement un amas d’objets (matelas, couettes, chaises, tréteaux …) en une représentation du mont Cervin. Nous frappent ici la justesse de cette représentation faite de bric et de broc, son adéquation avec la réalité, et sa capacité à nous « transporter » face à la montagne. A l’image « bricolée » se superpose sans peine l’image symbolique de ce lieu légendaire. Sans doute devenons-nous aujourd’hui plus prompt à laisser la représentation remplacer la réalité. A vivre par procuration et, dans notre rapport du monde, à faire en quelque sorte abstraction de l’ensemble de nos sens, « submergés » que nous sommes par ces images. Mais il est ici question d’autre chose. Nous nous trouvons confrontés à une déconstruction de cette représentation. Passé une première lecture et devant ce qui pourrait paraître comme une forme d’amusement sans autre intérêt que de nous faire sourire, ce qui n’est déjà pas rien, revient sans cesse une manière étonnante de considérer et de décrire le monde, qui nous le rend plus riche.