Le titre de l’ouvrage de Pascal Rivet Rase Campagne dit sans détour le projet. De son parcours ponctué de séries aux stratégies diverses – détournement, infiltration, travestissement, reproduction – marquées par l’emploi d’outils et de médiums aussi variés que l’assemblage, le dessin, la photo et la vidéo, la peinture et la pyrogravure, Pascal Rivet entend faire un bilan. Non pas en manière de rétrospective mais en une position d’observateur, à juste distance, avec ce qu’il faut d’empathie et de légère ironie pour évoquer son élément : le monde rural, ses hommes et ses paysages. Loin du folklore, l’artiste voit depuis longtemps se produire à bas bruit le choc d’une société paysanne traditionnelle avec un monde contemporain globalisé. Pour évoquer cette profonde mutation autrement qu’en termes productivistes ou déclinistes, Pascal Rivet use de ses armes favorites l’imitation, la construction (en bois lambda) à échelle réelle d’objets petits (tronçonneuses) ou grands (tracteurs), la réalisation de tableaux de genre (paysages ruraux, concours agricoles), ou d’engins – ces puissants tracteurs, symboles de « progrès » et souvent objets de compétition – au moyen de la pyrogravure ou encore de la broderie. Des matériaux et techniques rudimentaires qui s’ils n’excluent pas un façonnage de titan, semblent dater d’avant la Révolution industrielle. Il y a aussi les sigles, les noms, les titres poétiquement détournés de la France agricole, autant de signes traduisant tout autant la détresse que la fierté. Il se joue là un acte fort, une nouvelle façon d’envisager les relations entre l’art et les traditions populaires.